C'est un immeuble de quatre étages et datant des années soixante qui porte mal son nom. L'HLM Les Cigales, au 5, rue des Lavandes, au Pontet. "Les cigales, ça fait bien longtemps qu'on les entend plus, et la lavande, on ne risque pas de la sentir, vu l'odeur immonde des cafards", lâche d'emblée Chantal Mbokbodi, locataire au troisième étage de l'immeuble.
Les cafards, il y en a des milliers qui, la nuit, grouillent, à la faveur de l'obscurité, sans interruption dans l'immeuble. Une petite dizaine de foyers seraient concernés. Le point de départ de cette épidémie ? L'appartement d'une locataire indélicate, mère de trois jeunes enfants qui, il y a un mois, aurait quitté l'immeuble, laissant pourrir sur place ce qu'il contenait et abandonnant ses animaux de compagnie à leurs excréments.
Joris Hébrard, le maire du Pontet, explique que la police municipale est intervenue il y a une dizaine de jours dans l'appartement. "On a été alerté par une voisine, car des chats miaulaient à l'intérieur de l'appartement". Il ajoute qu'"en tant que maire, (il) aime bien que les bailleurs prennent aussi leurs responsabilités".
À l'arrivée des agents de la police municipale, trois chats étaient morts, tout comme deux furets retrouvés sous la baignoire. Sept chats encore en vie ont été recueillis par la SPA. "L'un des agents de police municipale, une femme, a vomi en raison de l'odeur", précise Chantal.
À mesure que l'on monte vers le troisième étage et l'appartement qui serait la source de cette plaie, l'odeur se fait en effet insoutenable. Un mélange indescriptible entre les blattes en décomposition et les produits à base d'acide déversés sur les sols et les murs donnent des haut-le-coeur. Partout, le sol est jonché de cadavres de ces nuisibles.
"J'en suis à acheter les sachets anti-cafards par cartons entiers, explique excédé Abdel Karim, l'un des locataires concernés. J'en donne à mes voisins." Ce que confirme Chantal qui craint pour sa santé face à l'utilisation intensive de ces produits. Abdel Karim a lui deux enfants de 3 et 5 ans, à qui il interdit de quitter de sortir de l'appartement pieds nus. Sur son téléphone, il montre les photos du dispositif qu'il met en place chaque soir dans sa salle de bains pour lutter face aux occupants. "Tous les matins, j'en retrouve 200, morts. Ils passent par les tuyaux", se désole-t-il.
Les cadavres des blattes s'entassent devant la porte de l'appartement délaissé par sa locataire.ange esposito
La plupart des locataires cherchent aujourd'hui à quitter ce lieu aux limites de l'insalubrité et se sentent abandonnés par leur bailleur.
"Ils sont venus ces jours-ci pour désinfecter l'appartement, sauf que les cafards se sont propagés dans tout l'immeuble et y compris chez nous. Alors, quand on a demandé qu'ils viennent aussi chez nous, l'OPHLM nous a demandé 30 €. 30 € ! Comme si c'était de notre faute !", ne décolère pas Chantal.
Au bord des larmes, Aziza Zbiri, arrivée là au mois de mai, confie ne plus "pouvoir recevoir son petit-fils chez elle". Elle ajoute avoir du mal à dormir la nuit, sachant les bêtes aiment particulièrement l'obscurité..."Ça rend fou !"
Les enfants de Chantal ne viennent plus la voir non plus. L'immeuble sent trop fort. C'est la dignité de ces personnes qui semble atteinte.
Dans le hall de l'immeuble, à côté des boîtes aux lettres où s'affiche encore le nom de la locataire indélicate, une grande feuille A3 aux couleurs de l'OPHLM du Grand Avignon annonce une enquête de satisfaction à venir pour le mois de septembre. Gageons que les locataires auront des choses à dire.
Si rien ne bouge et que leurs doléances ne sont pas entendues, les locataires, à l'image d'Abdel Karim, envisagent d'engager une grève des loyers.
Source LA PROVENCE